Des seins hauts et fermes, un corps mince et sans cellulite, un sexe épilé et rosé, des fesses hautes et rebondies : on ne compte plus
le nombre d’injonctions faites aux femmes en terme de beauté (j’en ai déjà
parlé précédemment sur Rue89 en dressant une cartographie du corps parfait).
En Asie, on peut rajouter une exigence de plus à cette
interminable liste : celle de sourire continuellement.
En Corée du Sud plus précisément, où une femme sur 5 a déjà
subi une opération de chirurgie esthétique, on ne manque pas d’imagination pour
booster le juteux marché de l’apparence. Après le rabotage de la mâchoire, les
injections de fossettes ou le débridage des yeux, voici le « Smile
lipt » (contraction de "lip" (lèvre) et "lift" ).
La clinique Aone, qui réalise cette opération pour 2000$,
nous la présente façon télé-achat dans une vidéo surréaliste : « Les coins
de la bouche s'élèvent naturellement après l'intervention, et bien que les
coins de la bouche restent renversés sur un visage impassible, ils s'élèvent
bien plus distinctement que la normale au cours d'un sourire ».
Un résultat façon sourire de Joker qui fait froid dans le dos….
Cette dictature du sourire s’immisce dans tous les moments
de la vie quotidienne, même lors d’un repas au fast-food. Une chaîne de
restauration rapide japonaise l’a bien compris en proposant à sa clientèle le
« Liberation wrapper » : un emballage de hamburger qui permet
aux femmes de dissimuler leurs bouches quand elles mangent et d’afficher ainsi
un sourire permanent, même en avalant un énorme sandwich.
La vidéo de présentation nous explique l’importance de l ‘ « ochobo » au Japon, « un petit sourire modeste considéré comme attirant ».
Résultat : la chaîne de fast-food a vu ses ventes augmenter de 213% auprès des femmes. On notera que le nom de l’emballage, « Liberation Wrapper », est quelque peu paradoxal : on vend aux femmes l’injonction de se couvrir comme une libération !
La vidéo de présentation nous explique l’importance de l ‘ « ochobo » au Japon, « un petit sourire modeste considéré comme attirant ».
Résultat : la chaîne de fast-food a vu ses ventes augmenter de 213% auprès des femmes. On notera que le nom de l’emballage, « Liberation Wrapper », est quelque peu paradoxal : on vend aux femmes l’injonction de se couvrir comme une libération !
En Occident, même si les femmes n’ont pas encore sauté le
pas de la chirurgie esthétique pour afficher une bouche de Joker, la dictature
du sourire n’en est pas moins présente.
Brigitte Laloupe (la blogueuse Olympe) l’explique très bien dans
son livre « Pourquoi les femmes gagnent-elles moins que les
hommes ? » : les femmes sourient plus que les hommes, c’est un fait
établi.
« Sur des photos de classe de la maternelle à l’université, dans les magazines et les journaux, les personnes de sexe féminin sourient plus souvent : 63 % des garçons en maternelle et primaire contre 82 % des filles, 58 % des hommes contre 80 % des femmes dans les magazines. Cela n’est manifestement pas inné puisque la différence n’apparaît qu’à 5 ans. Incontestablement, il est attendu des femmes qu’elles sourient, mais qu’attend-on des hommes ?
« Sur des photos de classe de la maternelle à l’université, dans les magazines et les journaux, les personnes de sexe féminin sourient plus souvent : 63 % des garçons en maternelle et primaire contre 82 % des filles, 58 % des hommes contre 80 % des femmes dans les magazines. Cela n’est manifestement pas inné puisque la différence n’apparaît qu’à 5 ans. Incontestablement, il est attendu des femmes qu’elles sourient, mais qu’attend-on des hommes ?
Une analyse du nombre de réponses obtenues par les utilisateurs des sites de rencontres sur internet nous donne des indications. On apprend que, pour espérer obtenir plus de messages que la moyenne les femmes doivent regarder l’objectif tout en souriant ou en adoptant une moue un peu coquine.
Pour les hommes, c’est l’inverse, il faut plutôt faire la
gueule (ou, du moins, ne pas sourire) et regarder ailleurs. »
Laissons à Vincent Estellon, cité dans l’ouvrage, le soin de
conclure ce billet : « Il y a effectivement une inégalité des sexes face à la
mauvaise humeur. Un homme qui fait la tête est perçu comme ayant du caractère,
alors qu’une femme énervée sera souvent taxée d’hystérique. »
Dur de garder le sourire dans ces conditions…
Edit : A lire sur le sujet, un article très intéressant que m'a transmis Mona Chollet et qui démontre que le genre influence également le port d'appareils dentaires
Edit : A lire sur le sujet, un article très intéressant que m'a transmis Mona Chollet et qui démontre que le genre influence également le port d'appareils dentaires
Si tu savais le nombre de fois qu'on m'a dit "hey mais souris" "aller un petit sourire". C'est assez répandu sur IG.
RépondreSupprimerOh encore "mais fais pas la gueule!" "je fais pas la gueule j'ai un visage naturellement impassible".
C'est effrayant !
RépondreSupprimerEt paradoxal: on attend des filles et des femmes de sourire, mais leur sourire tend à les affaiblir ( elles ont l'air moins compétentes, moins sûres d'elles... ).
Terrible comme un sourire, en principe sympathique, se transforme en injonction de "beauté" et donc de domination.