Les clichés semblent peser plus lourd sur la balance que les
kgs, tel est l’enseignement d’une étude menée par l’Université d’Hawaii, de
Manchester et de Monash.
On y apprend que les femmes en surpoids souffriraient des préjugés
« anti-gros », même une fois devenues minces.
Au cours de cette étude, les chercheurs ont demandé aux
participants de lire des descriptions de femmes :
-
Qui avaient maigri (de 32 kgs)
-
Qui avaient gardé un poids stable pendant une
longue période
-
Qui étaient obèses ou minces
Les participants (hommes et femmes) devaient ensuite
noter ces femmes en fonction de leur beauté et d’autres facteurs.
Les chercheurs ont été surpris de découvrir que les
participants ont exprimé des préjugés plus importants envers les femmes en
surpoids qui avaient maigri qu’envers celles qui avaient gardé un poids stable
(qu’elles soient grosses ou minces).
Il est ainsi apparu que les anciennes obèses étaient
perçues comme moins attirantes que celles qui ont toujours été minces, en dépit
d’un poids identique.
Autre découverte plutôt dérangeante de
l’étude : le nombre de préjugés négatifs envers les obèses a augmenté
lorsqu’on a donné aux participants des informations suggérant que le poids était
facilement contrôlable (fausse information bien entendu).
Comme l’explique Kerry O’Brien, une des co-auteures
de l’étude « On entend souvent dire que le poids est facilement contrôlable
alors que les plus grands scientifiques de notre époque pensent que la
physiologie, la génétique et l’environnement alimentaire sont les vrais
facteurs qui déterminent le poids et la perte de poids.
Le poids apparaît ainsi incontrôlable en dépit de la
volonté, du savoir et de l’acharnement à vouloir le perdre. Malgré tout, de
nombreuses personnes perçues comme « grosses » luttent en vain pour
maigrir afin d’échapper à cette stigmatisation sociale douloureuse. Nous devons
revoir nos approches et nos perceptions du poids et de l’obésité. »
« Les descriptions de perte de poids, comme on peut
en voir souvent dans des publicités à la télévision, peuvent aggraver de façon
significative la stigmatisation de l’obésité. Le fait de croire que les
obèses peuvent perdre du poids facilement renforce encore plus les préjugés
négatifs et les ressentiments envers les personnes en surpoids. (…) Etant donné
le nombre important de personnes qui peuvent être touchées par ces préjugés, la
discrimination doit être réduite de façon drastique au niveau de la société
toute entière ».
C’est en effet
une refonte totale des mentalités qui est à envisager : Une
étude réalisée en 1961 révélait que des enfants d'âge scolaire préféraient
avoir un ami en béquilles, en chaise roulante, dépourvu de mains ou balafré plutôt
qu'un ami obèse. Répétée 40 ans plus tard, l'expérience a livré des résultats
encore plus accablants : «La prévalence de la discrimination en lien avec
le poids était de 7 % en 1995. En 2005, elle atteignait 12 %, signale Simone
Lemieux. Contrairement à d'autres conditions qui affectent la santé physique et
psychologique des personnes, l'obésité est perçue très négativement dans notre
société.».
Plus inquiétant
encore, le personnel de santé lui-même ferait preuve de discriminations :
« Les
personnes qui souffrent d'obésité disent avoir été victimes de stigmatisation
de la part de médecins (69 %), d'infirmières (46 %), de nutritionnistes (37 %)
et de psychologues (21 %). Résultat: elles moins enclines à consulter un
professionnel de la santé ». Une
autre étude a démontré que les femmes obèses ont quatre fois plus de grossesses non prévues
et quatre fois plus d'avortements. Elles sont également moins suivies sur le
plan gynécologique que les femmes de poids normal. Une des hypothèses est que
les médecins hésitent à leur prescrire la pilule alors que pour elles les
bénéfices seraient supérieurs aux risques, selon l'Organisation mondiale de la
santé (OMS). Certains praticiens croient à tort qu'elles n'ont pas de
sexualité.
Quand on voit
l’importance de la télévision sur ces préjugés, on ne peut que s’inquiéter de
la recrudescence d’émissions racoleuses telles que « Zita, dans la peau
d’une obèse » diffusée récemment sur M6. En Angleterre, un
documentaire est allé encore plus loin avec « My big fat
fetish ». Le concept : suivre 4 jeunes femmes très rondes qui veulent
devenir les plus grosses possibles pour tirer profit de leurs corps (les « Fat
Admirers », hommes amateurs de femmes rondes, se constituent en fan clubs
et sont prêts à payer pour une « squashing dance »).
Un
sale coup pour l’image des obèses qui n’avait pas besoin de cela…