Après les baby-showers et les divorce parties, voilà que les
américains inventent les « mammogram
parties ». Le concept : encourager les mammographies en proposant
aux femmes venant passer l’examen manucure, fontaine de chocolat, massage et
consultation beauté. Le tout dans une atmosphère festive, entourée de ses amies
ou collègues.
« Une bonne façon de tordre le cou à l’idée reçue
voulant que la mammographie soit une expérience horrible et inconfortable. Et de
passer une soirée très agréable » affirme une des participantes.
Sauf que certains médecins ne voient pas l’initiative d’un
bon œil, d’autant qu’il y a controverse au sujet de l’âge à partir duquel les femmes
doivent se soumettre à cet examen.
L’American Cancer Society et la plupart des médecins
affirment que c’est 40 ans mais l’United States Cancer Society Services Task
Force a recommandé aux femmes l’année dernière d’attendre 50 ans. Et de ne
passer qu’une mammographie tous les 2 ans jusqu’à l’âge de 74 ans. La raison
évoquée : leur éviter un stress et des traitements inutiles dus aux faux
positifs (d’autres pensent qu’il s’agit davantage d’une raison économique).
« Cela pourrait être une bonne manière d’améliorer
l’observance et de rendre la mammographie plus agréable mais tout le monde ne
devrait pas être invité » affirme le Dr Julie Silver. « Toutes les
femmes n’ont pas besoin d’une mammographie et cet examen doit être prescrit
selon des critères bien définis. ». Elle conseille donc aux femmes
d’effectuer cet examen chez un médecin qui sera à même de le programmer en
fonction de l’âge et de l’histoire personnelle de sa patiente.
Au-delà de cette raison purement médicale, un autre aspect
me dérange à titre personnel. Pourquoi, dès lors qu'il s'agit de susciter l’intérêt des
femmes (pour leur faire passer une mammographie, leur
faire acheter une carte de crédit ou un stylo Bic), doit-on
systématiquement utiliser la futilité et la couleur rose ? N’est-ce
pas les infantiliser que de leur
proposer fontaine à chocolat et manucure pour les inciter à passer un examen
médical ? Autant je peux comprendre l’intérêt d’un groupe de femmes et
d’amies pour se motiver à passer ce moment pas très agréable, autant je reste
dubitative quant à l’aspect festif et genré.
Une façon de s’adresser aux femmes qui peut même avoir
les effets inverses à ceux escomptés, comme je l’expliquais dans
mon article sur Slate: une étude publiée dans le «Journal of
marketing Research» a ainsi montré que les publicités genrées contre
le cancer du sein (ruban roses, visages de femmes) amoindrissaient la
perception qu’avaient les femmes de leur propre vulnérabilité. Le Professeur
Sweldens de l’INSEAD l’explique ainsi «Notre recherche montre que les
communications sur le cancer du sein présentant de forts signaux sexués
activent une réaction défensive “ça ne peut pas m’arriver” chez les
femmes».
«Nos résultats vont à l’encontre des convictions répandues
dans le secteur de la publicité, a indiqué le Professeur Tavassoli de la London
Business School. Les campagnes sur le cancer du sein devraient éviter
d’utiliser des signaux liés au genre tels que montrer une femme se couvrant les
seins, car elles sont moins efficaces une fois placées dans des contextes
médiatiques qui amènent les femmes à réfléchir à leur propre genre.»
Une bonne raison d’arrêter le marketing genré, même pour des
campagnes de santé publique.
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