Pour ne pas rester au simple stade du constat, je me suis dit qu’il serait intéressant de vous aider à passer à l’action : voici donc quelques conseils pour apprendre à dire « non » au travail sans avoir peur de passer pour un pitbull ou une tire-au-flanc.
3 étapes d’introspection pour changer votre regard sur
le « non »
Etape 1 -Faites le point sur vos besoins : en tant
que fille, notre éducation ne nous a pas habituées à nous écouter mais plutôt à
faire passer les besoins d’autrui avant les nôtres. A dire oui même quand nous
pensons non, à faire plaisir, à être polie, bonne élève et surtout pas trop revendicative.
Examiner vos besoins régulièrement est pourtant fondamental
car cet exercice permet de poser des limites claires et de prendre des décisions
éclairées.
Il ne faut donc pas
hésiter à prendre rdv avec vous-même, plusieurs fois dans l’année pour vous
demander : « De quoi ai-je besoin dans ma vie en ce moment ? :
de plus de temps pour moi? De davantage de reconnaissance ? De stimulation ?
Est-ce que la demande qui m’a été faite me permet de nourrir ce besoin ou
répond uniquement au besoin de mon interlocuteur ? Quand je lui dis oui, à
quoi dis-je non pour moi ? ».
Etape 2 -Demandez-vous pourquoi vous dites oui : très
souvent chez les femmes que j’accompagne, derrière le « oui », se
cache le désir d’être appréciée, de faire plaisir ou la peur d’être considérée comme
incompétente ou tire au flanc. Tout ces croyances sont largement alimentées par
les stéréotypes de genre : comme on l’a vu dans l’article précédent, le
regard porté sur les collaboratrices qui refusent de rendre des services est généralement
plus sévère que celui porté sur leurs homologues masculins. Et il flotte souvent
autour des femmes une présomption d’incompétence qui les oblige à
sur-travailler ou à faire plus que ce qui leur est demandé.
Il est pourtant très important de savoir marquer ses
limites. Je l’ai souvent remarqué, une personne qui dit « non »
fermement et avec des arguments posés est bien plus respectée que la bonne
poire qui dit oui à tout, quitte à charger la mule et à ne plus arriver à
mettre en œuvre les missions qui lui sont assignées.
Etape 3 - Déconstruisez vos croyances autour du « non » :
dire non ne veut pas dire taper sur la table, claquer la porte, s’imposer ou
hausser le ton. On peut tout à faire dire non de manière polie, argumentée et
en respectant les besoins d’autrui, nous le verrons plus loin dans cet article.
Quelques conseils pour apprendre à dire non :
- Entraînez-vous à dire non : vous pouvez
commencer par de petites choses au début comme refuser la carte de fidélité qu’essaie
de vous refiler votre magasin de vêtements préférés ou le soin à 15€ que vous propose
votre coiffeur. Ou encore décliner votre participation au pot de départ de ce
collègue qui vous a pourri la vie depuis son arrivée dans la boîte. En vous
entraînant avec des actions à faible enjeu, vous prendrez de l’assurance et vous
verrez que la terre ne s’ouvre pas sous vos pieds quand vous dites non.
- Préparez une liste de réponses toutes faites :
quand j’ai commencé à travailler à mon compte, j’ai reçu beaucoup de
sollicitations, plus ou moins intéressantes, plus ou moins rémunérées. J’ai dû
à chaque fois arbitrer en fonction de mes besoins et objectifs et ça a été
l’occasion parfaite pour apprendre à dire « non » poliment et fermement.
J’ai depuis préparé une liste de réponses toutes faites qui me font gagner du
temps et m’évitent de trop avoir à tergiverser.
Quelle que soit votre décision, ne laissez pas passer trop
de temps avant de répondre afin de ne pas donner une mauvaise image ou mettre
dans l’embarras votre interlocuteur. Ne vous répandez pas non plus en
justifications, soyez ferme et simple dans votre réponse.
- Prenez le temps de donner votre réponse : trop
souvent, poussée par l’urgence du besoin de son interlocuteur on répond trop
rapidement, quitte ensuite à s’en mordre les doigts. La première chose à faire
est de reformuler la demande histoire de temporiser et mettre l’autre face à
ses responsabilités. « Si je comprends bien, tu veux que je reprenne ce dossier,
qui est déjà hors délai, en plus des 5 dossiers que j’ai à gérer, j’ai bien
compris ta demande ? ». En général, votre interlocuteur acquiescera
et sera légèrement déstabilisé face à l’énoncé de la demande , surtout si
elle est exagérée. Quant à vous, vous aurez gagné un peu de temps. Ensuite,
montrez que vous avez compris son besoin : « Les ressources en
interne sont débordées, tu as donc besoin d’efficacité et de clarté, c’est pour
cela que tu te tournes vers moi c’est bien cela ? ». Suite à sa
réponse, réservez-vous le droit de ne pas y donner suite immédiatement. « J’ai
bien entendu ta demande. Comme tu le sais, être efficace est très important
pour moi. C’est pourquoi, j’ai besoin de faire le point sur mes dossiers en
cours : je ne veux pas te dire oui et ensuite fournir un travail qui n’est
pas à la hauteur de mes attentes en terme qualité. Je reviens vers toi dans l’après-midi
sans faute, j’ai compris que c’était important pour toi ».
- Proposez une alternative : si vous le
souhaitez, vous pouvez répondre « Oui, mais… » : « Ok pour
prendre en charge ce dossier si j’ai un délai supplémentaire/des personnes en
interne pour m’aider/la possibilité de déléguer un autre projet ». Mais
aussi « Non, mais … » : « Désolée, je ne peux pas t’aider,
en revanche je peux te recommander une personne très compétente sur le sujet/je
ne peux pas prendre ce sujet en intégralité, en revanche, je veux bien apporter
mon expertise sur un point en particulier »
- Ecoutez vos émotions : Si on se sent dépassé.e
par la colère car on vient une énième fois vous demander un service, plutôt que
d’y céder, il vaut mieux prendre un temps d’arrêt, sortir prendre l’air et
faire une pause. Cette émotion doit être entendue comme un clignotant sur un
tableau de bord : c’est le signe qu’un de vos besoins est contrarié. L’idée
n’est pas ici de la refouler en fumant une cigarette, en vous jetant sur votre
téléphone pour scroller indéfiniment ou sur une tablette de chocolat. Mais plutôt
de la prendre comme un messager qui essaie de vous dire quelque chose :
une limite a été franchie.
Pour conclure, je reprendrai les mots du psychosociologue
Jacques Salomé, "Oser dire non à l’autre, c’est oser dire oui à soi-même" .
Alors, vous commencez quand ?